Publié le 29 septembre 2017

Compositeurs : Andrew Staniland | Nicole Lizée | Kevin Lau
Interprètes : Orchestre du Centre national des Arts du Canada | Alexander Shelley
Périodes : Contemporain
Genres : Musique orchestrale

2018 – Sélectionné pour le Prix JUNO Composition classique de l’année
Andrew Staniland, Phi, Caelestis

Cathy Levy, productrice générale, Danse
Alexander Shelley, directeur musical et chef d’orchestre

Cette commande historique du CNA associe trois grands chorégraphes canadiens à trois compositeurs comptant parmi les plus fascinants du pays. Jean Grand-Maître, éminent et prolifique directeur artistique de l’Alberta Ballet, s’associe au créateur de musique nouvelle Andrew Staniland, lauréat de nombreux prix. Emily Molnar, chorégraphe avant-gardiste du Ballet BC, trouve son alter ego en Nicole Lizée, une compositrice novatrice. Guillaume Côté, talentueux danseur et chorégraphe associé du Ballet national du Canada, forme un parfait tandem avec Kevin Lau, jeune compositeur émergent.

Un groupe de danseurs exceptionnels a donné la première très applaudie de trois spectaculaires ballets en un acte sur des musiques orchestrales originales interprétées par l’Orchestre du Centre national des Arts sous la baguette de son directeur musical Alexander Shelley, les 20, 21 et 22 avril 2017. Un projet de création sans précédent, un événement et un enregistrement soulignant le 150e anniversaire du Canada!

Le projet RENCONTR3S est rendu possible grâce au soutien de généreux donateurs de la Fondation du Centre national des Arts, qui croient à l’importance d’investir dans les créateurs canadiens, comme l’honorable Margaret McCain, C.C.

Les oeuvres

Phi, Caelestis

  • Andrew Staniland, composition originale (Phi)
  • Jean Grand-Maître, chorégraphie (Caelestis)
  • Wendy Tilby – Amanda Forbis, projection vidéo
  • Raven Hehr, conception des costumes
  • Jock Munro, conception des éclairages
  • Interprètes : Leiland Charles, Jennifer Gibson, Garrett Groat, Hayna Gutierrez, Mariko Kondo, Alan Ma, Kelley McKinlay, Reilley McKinlay, Nicolas Pelletier, Luna Sasaki

www.albertaballet.com

« En mangeant le fruit de l’arbre de la connaissance, ils ont découvert leur nudité, leur vulnérabilité, leur humanité… » — Joni Mitchell

Caelestis est un ballet qui oppose de manière aléatoire des paysages contemporains saisissants, reflétant notre monde en pleine mutation, à un groupe de dix danseurs, nus en apparence, exécutant un tourbillon de gestes à vif, émotifs, primordiaux, souvent érotiques, sur une toile de fond aux esthétiques contrastées. C’est une plongée au coeur de notre propre mortalité, dans le contexte d’un infini sacré. Puiser dans une thématique aussi riche et profonde avec d’autres artistes de talent a été une aventure exaltante et mémorable.

© Jean Grand-Maître

Dès le début de notre collaboration, le chorégraphe Jean Grand-Maître m’a fait parvenir un grand paquet rempli d’images et de textes inspirants. Le contenu était aussi beau que varié : des images tour à tour purement abstraites ou explicites évoquant l’humanité, la technologie, la nature, la beauté et la violence.

Toutes ces images étaient reliées d’une façon ou d’une autre au nombre d’or ou Phi. Le nombre d’or n’est pas quelque chose de nouveau pour moi, puisque j’ai déjà été séduit, depuis longtemps, par ce que l’on désigne souvent comme « la plus belle proportion de la nature ». On sait que des compositeurs comme Bartók, Webern et Debussy ont utilisé le nombre d’or dans leur musique, en l’appliquant généralement comme une proportion formelle (situant par exemple le climax musical dans la « section dorée »). Pour moi, Phi a été un catalyseur et une inspiration, à la fois par sa beauté extramusicale et par son application littérale pour la création de mélodies et d’harmonies inspirées par la divine proportion.

La partition comprend trois mouvements : I: Rex, II: Styx, III: Eden. Le dernier mouvement intègre des fichiers sonores électroniques atténués, créés à partir d’enregistrements de la poète Jill Battson lisant des réflexions de mathématiciens sur le thème de la beauté, y compris cette citation d’Euclide  : « Les lois de la nature ne sont que l’expression de la pensée mathématique de Dieu. »

© Andrew Staniland

Keep Driving, I’m Dreaming

  • Nicole Lizée, composition originale (Keep Driving, I’m Dreaming)
  • Emily Molnar, chorégraphie (en collaboration avec les artistes du Ballet BC)
  • Kate Burrows, conception des costumes
  • Jock Munro, conception des éclairages
  • Interprètes : Brandon Alley, Andrew Bartee, Emily Chessa, Alexis Fletcher, Scott Fowler, Gilbert Small, Christoph von Riedemann, Kirsten Wicklund

« Tout m’échappe et s’évapore. Sans cesse je sens que j’ai été autre, que j’ai ressenti autre, que j’ai pensé autre. Ce à quoi j’assiste, c’est à un spectacle monté dans un autre décor. Et c’est à moi-même que j’assiste… Tout est dans tout. Je porte en moi tous les rêves du monde. » Extraits du Livre de l’intranquillité de Fernando Pessoa

Un rêve en abyme. Cette œuvre porte sur nos mondes intérieurs où nous nous retirons pour nous observer, pour écouter l’autre. Au début du processus, j’ai posé aux danseurs la question suivante : « Où iriez-vous si vous pouviez mettre votre vie en suspens? » Voilà ce que fut notre point de départ.

© Emily Molnar

Le ton et le timbre de Keep Driving, I’m Dreaming puisent dans le cinéma néo-noir des années 1980 et 1990… s’inspirant de la manière hyperstylisée dont sont filmées et traitées les scènes de mouvement et de déplacement… inertie romancée dans une rage de néons hyperkinétique. Des sonorités émergent d’états transitoires… fluctuant entre des stations de radio FM… apparitions fantomatiques semblables à la musique à peine audible d’une cassette déformée et réenregistrée depuis longtemps… automobile voyageant hors du temps et de l’espace, corps en mouvement, tournant à vive allure aux intersections dans des lieux improbables ou fonçant sur des voies inexorablement droites, au crépuscule. Le paysage que vous voyez dans le rétroviseur est un endroit où vous n’êtes jamais allés. La composante électronique de la pièce mêle les sonorités d’appareils analogues et archaïques : tables tournantes, cassettes, omnichords, stylophones, oscillateurs et magnétophones à ruban. Un merci spécial au virtuose des platines Paolo Kapunan, alias DJ P-Love, pour sa contribution musicale.

© Nicole Lizée

Dark Angels

  • Kevin Lau, composition originale (Dark Angels)
  • Guillaume Côté, chorégraphie
  • Yannik Larivée, conception du décor
  • Christopher Read, conception des costumes
  • Jock Munro, conception des éclairages
  • Interprètes : Skylar Campbell, Greta Hodgkinson, Harrison James, Elena Lobsanova, Svetlana Lunkina, Evan McKie, Félix Paquet, Sonia Rodriguez, Dylan Tedaldi, Xiao Nan Yu

C’est toujours une chance extraordinaire de pouvoir collaborer d’une façon aussi étroite avec un compositeur. Nous venions tout juste de terminer, Kevin et moi, le ballet narratif Le Petit Prince, et l’idée de travailler sur une nouvelle partition ne reposant sur aucune trame narrative nous semblait différente et fort bienvenue. Nous avons commencé par établir une atmosphère, et choisir des impressions et des émotions. Nous voulions créer une oeuvre qui évoquerait la résistance et les difficultés que l’on peut rencontrer lorsqu’on vit dans un milieu nouveau et qu’il faut s’habituer à des personnes et des endroits qui ne nous sont pas familiers. À mesure que les danseurs ont commencé à interagir avec la musique, ils ont pris l’allure de magnifiques personnages tentant de se faire une place dans ce monde nouveau.

© Guillaume Côté

Les premiers germes musicaux de Dark Angels – qui marque ma seconde collaboration avec le chorégraphe Guillaume Côté – ont été semés dans les derniers mois menant à la création de notre premier ballet, Le Petit Prince. Notre désir d’arpenter un terrain entièrement différent, musicalement et gestuellement, a mené à la composition d’une partition dénuée de toute trame narrative et de tout sujet, très peu balisée en dehors de certaines sensibilités qui nous interpellaient tous deux : la tension, la lutte, la résistance, l’énergie.

Ces éléments ont forgé l’esprit de Dark Angels, dont l’étendue et la forme évoquent une symphonie. Un allegro tumultueux cède le pas à un vif interlude (où un solo de violoncelle élégiaque se métamorphose en une vision de cauchemar), pavant la voie à un finale ancré dans des gestes rituels et propulsé par une batterie de percussions explosives. Un « marteau » rythmique de six notes parcourt toute la partition comme un fil de fer.

Le titre, Dark Angels (« anges noirs »), est à mes yeux une métaphore de la nature humaine : notre capacité d’aimer et nos pulsions destructrices, entourées d’un même, fragile rempart.

© Kevin Lau